Jeudi 28 septembre était organisé un ciné débat autour de la question de l'eau, en partenariat avec l'ALPAD, en présence du Co-réalisateur Patrick Colin !
Résumé
Nous proposions dans la petite commune de Rion des Landes, une soirée cinéma suivi d'un débat autour du film "Apocalypse eau", en présence du co-réalisateur Patrick Colin et de paysans de notre Réseau qui témoignaint de leurs expériences.
À l’heure du réchauffement climatique, de la montée et de l’acidification des mers, nous nous intéressons "aux racines des océans" que sont les cours d’eau, là où la prégnance de l’homme est totale. Notre eau douce qui fait le lien entre nos terres, nos littoraux et nos océans est aujourd’hui porteuse de toutes les pollutions. Au moment où la terre montre des signes choquants d’épuisement, l’argument écologique commence à se faire de plus en plus entendre et certains, de plus en plus nombreux, commencent à explorer des pistes d’avenir… Il y a urgence !
Un bien commun
L’eau est un bien commun, essentiel à la vie de l’humanité et de l’ensemble des êtres vivants. La terre ne se cultive pas sans eau, l’eau ne se gère pas sans la terre. Conditionnée par son grand cycle naturel (précipitations, évaporation, ruissellement, infiltration…), les liens entre l’eau, les sols et donc l’agriculture, sont indissociables. Depuis des siècles, les agriculteurs aménagent l’espace pour gérer l’eau et améliorer leurs conditions de production. (Extrait avis du CESE « La gestion et l’usage de l’eau », 23 avril 2013).
Avec le dérèglement climatique, nous sommes confrontés à des défis majeurs concernant la gestion de l’eau en agriculture. Raccourcissements des cycles végétatifs, pics de chaleur, moindre disponibilité de l’eau dans les sols, les rivières, les nappes et les réservoirs, ainsi que les intrusions salines et risques de précipitations intenses vont fortement impacter l’agriculture et ses usages de l’eau. L’agriculture doit anticiper les évolutions climatiques et intégrer les questions environnementales.
"L’adaptation, ce n’est pas une option", Christophe Béchu
L’agriculture est la première consommatrice d’eau, avec 45% du total. « L’adaptation, ce n’est pas une option, c’est de toute façon une obligation », assurait le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu lors d’une interview*, en août 2022. Il assure que le gouvernement veut « faire passer des messages sur la nécessité et le besoin d’accélérer les transitions » notamment sur l’utilisation de l’eau.
L’eau à usage agricole sert principalement à alimenter le bétail et irriguer les cultures. Le bassin Adour-Garonne est le plus gourmand (78% du total d’eau consommée est attribuée à l’agriculture), et la région Nouvelle-Aquitaine devrait être particulièrement impactée en matière d’eau par les changements climatiques. La diminution potentielle de la recharge de ses nappes phréatiques pourrait atteindre 30 à 50 % et faire baisser les débits moyens de 20 à 30 % à l’horizon 2030 (Source : Néo terra).
"Refonder notre modèle agricole", Emma Haziza
Les débits naturels des cours d’eau et la recharge des nappes souterraines vont diminuer. Dans le même temps, les besoins en eau des plantes vont augmenter, et ce besoin en eau concernera également des cultures traditionnellement non irriguées. « Parmi les mesures à prendre le plus vite possible, il y a la refonte totale de notre modèle agricole. Comment nos paysans peuvent-ils sauver l’eau ? Il faut d’abord réhydrater la terre, y remettre de la vie, en particulier du microbiote. Nous savons qu’il y a plus de bactéries dans notre corps que de cellules humaines. Sans nos bactéries, nous n’existerions pas. C’est la même chose pour le sol. Or, en tuant les invertébrés avec des pesticides notamment, on vient tuer la capacité d’un sol à s’oxygéner, à renfermer du carbone et à s’hydrater. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, nous pouvons recréer de petits cycles de l’eau localement avec de bonnes pratiques. Dans un sol hydraté, la transpiration (la rosée) va créer des masses d’air humides qui finissent par retomber 100 km plus loin. C’est un cercle vertueux qu’il faut enclencher. Ce n’est pas le réchauffement climatique qui créé la sécheresse ce sont nos modes de fonctionnement. Le réchauffement global ne vient que s’ajouter à cela. En intégrant des bandes enherbées par exemple, on réduit l’effet albédo (capacité du sol à réfl échir le rayonnement solaire, ce qui augmente l’effet de serre). Il faut que tout le monde aille dans le bon sens. » Emma Haziza, hydrologue.**
Une belle soirée
Une vingtaine de personne a assisté à la projection. Essentiellement des habitants de Rion et alentours, souvent bénévoles dans le cinéma associatif qui nous accueillait. Plutôt novices en matière d'agriculture, ils ont été agréablement surpris de voir que les discours que l'on peut tenir ne sont pas que des paroles en l'air, mais bien accompagnés d'actions et de faits. Les solutions existent, nous les mettons en oeuvre et nous les diffusons. Ils ont particulièrement apprécié de voir que les paysans s'emparent réellement des enjeux liés à l'eau en tant que bien commun, au climat, à l'environnement, à l'alimentation. Peu nombreux mais réellement intéressés par les prochains événements organisés par l'ALPAD, nous sommes ravis d'avoir sensibilisé un public parfois difficile à toucher. Mélanie Martin et Dominique Lollivier étaient les deux paysans adhérents à l'ALPAD, qui témoignaient en plus du co-réalisateur. Installée à Saint-Pierre-du-Mont sur les terres familiales depuis huit ans, Mélanie est à la tête d'une exploitation agricole de légumes bio. Installé à Rion des Landes Dominique élève lui des poulets bio et produit leur alimentation, il est autonome sur sa ferme. Deux beaux témoignages pour prouver qu'une autre agriculture est possible.
*«Changement climatique dans les Alpes: interview exclusive des ministres de l’Agriculture et de l’Environnement, unis face aux enjeux», La Provence, 05/08/2022
** Extrait de «Sécheresse: “Nous avons besoin d’un réveil global”» interview par Hugo Struna, EURACTIV France, 30 juin 2022